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Publié le février 24th, 2010 | par Carrefour des Chrétiens Inclusifs

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Lettre à l’Archevêque de Paris

Lettre ouverte du Pasteur Stéphane Lavignotte, Pasteur de la Maison verte de Paris 18e (Mission populaire évangélique), membre du Carrefour de chrétiens inclusifs.

 
 

Monsieur l’archevêque de Paris et président de la Conférence des évêques de France, le 30 novembre dernier, nous avons célébré à l’église Saint-Merri, à Paris, une soirée de prière œcuménique à l’occasion de la journée mondiale contre le sida, en communion avec les malades en France mais aussi dans les pays du Sud, avec des malades de l’association Basiliade. Au beau milieu de la soirée, un groupe de jeunes gens a interrompu la lecture de l’Evangile, jetant des boules puantes et des œufs sur l’assemblée et les célébrants, criant : «Pas de gays dans nos églises.»

Nous n’avons pas évoqué publiquement cette agression, ne souhaitant pas donner de la publicité aux groupuscules qui imaginent que les idées haineuses de l’extrême droite puissent avoir un quelconque rapport avec le message d’amour du Christ. Si je vous interpelle aujourd’hui c’est que cet incident n’est plus isolé. Dimanche 14 février, sur le parvis de Notre-Dame, plusieurs couples homosexuels, de retour d’un kiss-in organisé place Saint-Michel à l’occasion de la Saint-Valentin, se sont embrassés sur la place Jean-Paul-II, espace public. Ils ont été pris à partie par des groupes de jeunes catholiques proférant des insultes homophobes telles que «tarlouses de merde», «les pédés au bûcher», «cassez-vous, on est chez nous», «allez faire ça chez vous», les repoussant hors de la place. Que se serait-il passé si les forces de l’ordre ne s’étaient pas interposées ?

Ces deux incidents m’inquiètent. Les célébrations pour la journée mondiale contre le sida ont lieu depuis de nombreuses années à Saint-Merri, dans notre temple protestant de la Maison verte et à l’église des Blancs-Manteaux. Nous n’avions jamais subi une telle agression. Lors de l’incident place Jean-Paul-II, des jeunes catholiques, devant des caméras et les forces de l’ordre, ont proféré sans retenue des insultes, sans doute judiciairement condamnables, en tout cas bien loin de l’agapê chrétienne. Elles s’ajoutent à l’agression d’une célébration œcuménique inter-associative à Lille en juin 2008, d’un bar à Laval en avril 2009, du centre LGBT de Nantes en janvier 2010, à chaque fois par des personnes se revendiquant des positions actuelles du Vatican.

Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui certains jeunes catholiques se sentent autorisés à de tels comportements qui n’avaient pas lieu hier ? Cela tient-il à la compréhension qu’ils ont des décisions de l’Eglise catholique durcissant le refus de l’accès des homosexuels à la prêtrise et à la vie en communauté ? Des positions des Eglises catholiques, notamment en France, contre l’ouverture du mariage, de l’adoption et de la PMA pour les couples de même sexe ? Nous ne sommes sans doute pas d’accord sur ces sujets. Mais j’avais noté avec satisfaction l’affirmation du Vatican, par Jean Paul II dès 1992 et par Benoît XVI en 2008, selon laquelle son refus d’évolutions législatives ou ecclésiales sur ces sujets n’empêchait pas son refus de l’homophobie. Ces jeunes gens qui se réclament d’une défense vigoureuse de Benoît XVI – j’en veux pour preuve leur slogan «Habemus papam» place Jean-Paul-II ou l’évocation de «nos églises» dans l’agression dont nous avons été l’objet – semblent, eux, ne pas faire la différence.

Je ne peux croire que vous restiez silencieux sur de tels comportements, bien que pour l’instant informé de l’incident de Saint-Merri par des participants, vous n’ayez toujours pas réagi. Parce que ces jeunes ne sont pas des «dissidents» de l’Eglise catholique mais se revendiquent comme les plus fidèles de vos fidèles, une absence de prise de position pourrait leur laisser croire une sympathie de votre part et valider leur amalgame entre les positions de l’Eglise catholique et la légitimité de l’homophobie, les incitant à recommencer des actes condamnables. Je ne peux croire que vous ne condamniez pas publiquement de tels contre-témoignages de l’Evangile qui rejaillissent sur l’ensemble des chrétiens. Comme vous l’a demandé aussi l’association chrétienne LGBT David et Jonathan, une parole claire de votre part est attendue.

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Publications en ligne de la lettre sur Protestants dans la ville et dans Libération.


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