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Trans-Témoignages

Publié le mai 25th, 2017 | par Carrefour des chrétiens inclusifs

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Témoignage d’Anne-Gaëlle

Aujourd’hui, je suis une femme. Enfin, j’ai une carte d’identité de femme et je suis femme dans mon apparence extérieure, même nue. Je ne suis pas vraiment une femme car mon corps intérieur est celui d’un homme… Je suis une femme d’origine transsexuelle. Comme bien des homosexuels ayant la foi, je me suis demandé si je n’allais pas être damnée. N’est-il pas écrit dans Deutéronome 22- 5 : « La femme ne portera pas un habit d’homme, et l’homme ne se vêtira pas d’un vêtement de femme ; car quiconque fait ces choses est en abomination à l’Éternel, ton Dieu. » Mais quelle est la validité de telles sentences ? N’est-il pas écrit aussi des préceptes tels que : Deutéronome 22-22 « Si un homme a été trouvé couché avec une femme mariée, ils mourront tous deux, l’homme qui a couché avec la femme, et la femme » ou encore : l’Exode, chapitre 21, verset 7 : « Si un homme vend sa fille pour être esclave, elle ne sortira point comme sortent les esclaves« . Les textes anciens fourmillent d’injonctions et de jugements qui ont été progressivement abandonnés par l’Église elle-même… En tout cas, dans mon parcours, j’ai eu plutôt l’impression d’être accompagnée par Dieu.

Le genre masculin ou féminin, c’est comme une deuxième peau que notre environnement social greffe sur notre peau biologique dès les premiers mois de notre vie, et même avant. 99,9% des humains s’en satisfont, même si ça les gratte un peu parfois. Mais, pour les personnes dites « transidentitaires », il y a un rejet de greffe. Nul n’en connait la cause exacte et ce n’est pas plus la faute du donneur que du receveur. Mais la société trouve pratique de déclarer que c’est le receveur qui est « malade » afin de pouvoir le « soigner »… Pas plus que pour l’homosexualité, il s’agit d’un choix. Certains vont supporter la greffe très longtemps, comme moi qui ai tenu jusqu’à 57 ans, sous l’apparence d’un père de famille irréprochable, avant de basculer dans la transition. Pour d’autres, le genre imposé va se révéler insupportable dès le plus jeune âge.

C’est à quinze ans qu’a surgi en moi le désir fou d’être une femme, alors que j’étais un garçon « normal », l’aîné de cinq enfants dans une famille sans problèmes… A l’époque, j’ai prié Dieu avec ferveur, le suppliant de me transformer d’un coup de baguette magique. Puis il a fallu me résigner et assumer le mieux possible ce que le monde attendait de moi. Je me travestissais parfois en cachette, dans la honte, sans pouvoir n’en parler à personne. Études supérieures, carrière professionnelle de bon niveau, petites amies (jamais je n’ai éprouvé de désir homosexuel), mariage. Nous avions convenu avec ma femme que le secret que je lui avais révélé était une chimère que je dominerais par la volonté. Et j’ai mis mon mouchoir (ou plutôt une épaisse couche de béton) dessus, puisqu’en parler lui était insupportable. Nous avons eu une fille, puis un fils. Mais le désir fou, la frustration terrible, étaient toujours là, comme l’œil de Dieu dans la tombe de Caïn… Alors j’ai demandé à Dieu la grâce de me permettre de « tenir » sans me livrer à aucun passage à l’acte, pendant les vingt années qui suivraient, afin de conduire le mieux possible, en tant que père, mes enfants à l’orée de leur vie d’adulte, avec le maximum d’atouts. Je lui demandais de bien vouloir ensuite me tuer, car je savais que mes forces me lâcheraient et que je ferais souffrir ceux que j’aimais. Je pensais qu’ils assumeraient mieux un père mort qu’un père qui aurait changé de sexe.

Et puis, au bout de vingt ans, pendant lesquels j’ai compté les jours, une main mystérieuse a tout mis en place : mes enfants étant lancés dans la vie par de brillantes études, et c’est mon épouse qui a demandé le divorce parce qu’elle ressentait trop de malaise en moi (sans qu’on ait reparlé de ce qui me taraudait). Là-dessus, je suis tombée au chômage. Je me suis donc retrouvée seule face à une nouvelle page de ma vie à écrire. J’ai prié. Et Dieu a mis sur ma route la MCC (Metropolitan Community Churches) de Montpellier, où j’ai fait la connaissance de gays et lesbiennes formidables, vrillés à leur foi tout en essayant de déminer les condamnations que les textes anciens semblaient leur lancer. C’est dans le cadre d’un « Carrefour des Chrétiens Inclusifs » que j’ai fait mes premiers pas en pleine lumière en tant que femme, où j’ai d’emblée été reconnue comme telle, où je me suis sentie aimée de Dieu comme telle. Cela m’a fait croiser le chemin de la « Communion Béthanie », qui est pour moi comme une famille aimante.

Ma transition a consisté à être suivie par un psychiatre pendant un an, puis à prendre des hormones une année de plus pour avoir l’accord de mon équipe hospitalière pour me faire opérer. J’ai eu affaire à des médecins sérieux et humains. Mais j’ai évité le chirurgien français, de bonne volonté mais mal formé et mal entraîné, pour mettre entre les mains, à mes frais, d’un chirurgien thaïlandais de renommée internationale, modèle de gentillesse et de compétence. Opération magnifiquement réussie. Huit mois après mon retour, le tribunal de Grande Instance demandait à l’État de faire inscrire en marge de mon acte de naissance que désormais j’étais désignée par le sexe féminin sous mon nouveau prénom. Carte d’identité, carte vitale et autres ont été mis en conformité.

Les rapports avec ma famille ont comme prévus été douloureux. Mais personne n’a rompu les ponts et même mes enfants, la trentaine maintenant, acceptent de me voir, même en public. Idem pour toute la famille, même la plus lointaine. Je n’ai perdu que mes faux amis et j’en ai acquis beaucoup de nouveaux, notamment dans le monde LGBT. Je suis à la retraite mais suis débordée par mille activités para professionnelles ou militantes. Moi qui demandais la mort, j’ai reçu un surcroit de vie d’une grande richesse. C’est bien au-delà de ce que j’espérais.

Aussi, quand je me tourne vers mon parcours, j’ai le sentiment que Dieu n’a cessé de m’ouvrir les bonnes portes et de m’éloigner des mauvaises. Je me demande encore pourquoi. Peut-être mon témoignage est-il utile?

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