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Publié le juin 10th, 2014 | par Carrefour des Chrétiens Inclusifs

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Retraite #cci2014 : prédication de Nicolas « Pour me comprendre »…

Un grand merci au pasteur Nicolas Charrière, qui a assuré le culte et la prédication de vendredi ! 
 
(Source : http://areopage.net/atxtheb/Gen11_1-9.html )

 
 
Lecture biblique : Genèse 11,1-9 (TOB) « La tour de Babel ».
«Pour me comprendre,
Il faudrait savoir qui je suis.
Pour me comprendre,
Il faudrait connaître ma vie
Et pour l’apprendre
Devenir mon ami.»
(Véronique Sanson, « Pour me comprendre »)
Qui parmi vous n’a jamais rêvé d’être compris, enfin, finalement, alors même que nous nous battons régulièrement contre la caricature, les étiquettes, l’ignorance et la peur qui en naît, les jugements hâtifs et réducteurs ? Qui parmi vous n’a jamais rêvé d’être compris, enfin ! D’avoir une même langue, des mêmes mots pour que la communication soit réussie ! Si je te parle des sentiments que j’éprouve pour telle personne, que tu puisses comprendre ce que mes mots signifient. Si je t’évoque tel choix de vie, telle décision, telle réaction, que tu puisses comprendre ce que mes mots signifient. Les inscrire dans la grande histoire de ma vie. Car je n’ai rien d’autre que mes mots pour la mettre en récit et te raconter qui je suis en vérité.
Une même langue, de mêmes mots. C’est le point de départ de notre récit de la tour de Babel. Il fait écho à quelque jour de très profond en nous, quelque chose d’originaire, qui remonte aussi loin que notre naissance : le besoin de se faire comprendre et d’être compris. Pour les humains, il passe par le langage et les mots, quand bien même ce langage peut être non verbal aussi ! Bien communiquer et se comprendre est absolument essentiel pour vivre les uns avec les autres.
Cependant, comme l’étymologie le montre bien, il y a un piège dans la compréhension. C’est le fait de posséder, le fait de prendre le pouvoir. Avec le savoir vient souvent le pouvoir. Je crois te comprendre, mais en fait je t’enferme dans mes propres idées. Je peux dire ne pas te comprendre, mais en fait là aussi je t’enferme dans mes propres idées. Incompréhension et compréhension se rejoignent dans un même mouvement qui est jugement et pouvoir. C’est cette voie que vont suivre les humains à Babel : bâtir non une communauté, mais une tour qui touche le ciel: sans limites. Avoir un nom non pas pour être reconnu et respecté, mais pour garder un pouvoir : celui d’être un groupe replié sur lui-même. Etre un. N’être qu’un: une seule voix, une seule parole, une seule langue… une seule manière d’être humain. Pour chasser au plus loin ce qui dérange et vient mettre en question, ce qui fait peur parce que mal compris, ce qui pourrait mettre en question la force du groupe formé par des semblables, des identiques. La peur: être dispersé, ne pas faire partie du groupe (combien de fois avons-nous parlé la même langue que d’autres juste pour être des leurs?). Le projet: se faire un nom, impressionner, être reconnu. De légitimes aspirations, une peur que nous connaissons bien… Tout cela est aussi à l’origine de nos existences!
Et ainsi nous serons comme Dieu, semblent dire les constructeurs de la tour. Nous toucherons le ciel, nous serons identiques à l’unique. Nous ferons notre unité «contre» s’il le faut: contre celui qui n’est pas comme nous. Cette dérive, nous la connaissons toutes et tous, pour ces moments où les personnes faisaient communauté en excluant celui ou celle que nous sommes. Car ne plus avoir de limites à nos réalisations signifie être tout-puissants. Et il est difficile de laisser l’autre différent exister lorsque l’on se croit tout-puissant, donc sans avoir besoin de lui?
Pour ces moments où nous avons baigné dans cette terrible solitude de n’avoir personne autour qui puisse comprendre, quand bien même certains ou certaines affirmaient comprendre tout en enfermant… Pour ces moments où nous-mêmes, bien au chaud dans notre groupe, avons refusé la place à celui ou celle qui ne parlait pas notre langue, n’était pas comme nous… La tour de Babel dénonce un effet pervers de la compréhension: lorsque celle-ci devient un pouvoir sur l’autre, qu’elle fait l’unité de celles et ceux qui se comprennent contre les autres, lorsque la compréhension exclut. Je te comprends, je te prends avec moi, en moi, tu n’es plus toi, tu deviens qui je suis.
Cette prétention, Dieu va la mettre à bas. Cette uniformité, Dieu va la différencier. Cette immobilisme, Dieu va le disperser. A cette communauté installée, Dieu va proposer un voyage, des sédentaires il fera des nomades, toutes et tous seront transformés, comme le dit le thème de cette retraite. La compréhension si élevée se voit sommée de redescendre sur terre, de redécouvrir l’humilité.
A Babel, l’humanité est dispersée et ses langues diversifiées, et Dieu vit que cela était bon ainsi. Il est bon que la compréhension ne soit plus une évidence. Mais qu’elle demande du travail, un effort. Babel donne du sens à ce que nous vivons comme être humains. Dans cette solitude fondamentale qui nous frappe parfois encore, lorsque nous réalisons qu’en fait, nous ne sommes pas compris par qui que ce soit. Mais aussi dans cette fantastique et ébouriffante diversité qui fait la communauté humaine. Ce qui pourrait apparaître comme une malédiction à Babel est en fait une bénédiction: chacune et chacun, dans la langue qu’est sa propre vie, a une place. En dispersant l’humanité et en brouillant les langues, Dieu met en évidence la formidable variété qui existe chez les humains. Et créé ainsi une place pour chacune et chacun, dans la dignité.
Face au projet totalitaire des constructeurs de Babel, Dieu disperse, mélange, crée la confusion pour mettre à bas la prétention de celles et ceux qui jugent et excluent.
Il transforme ainsi les humains dans leur tendance à faire des tours de Babel pour les faire cheminer vers un projet d’humanité plus ouvert et bigarré, un projet d’humanité en chemin. Un projet d’humanité où, au coeur de cette dispersion, chacune et chacun trouve une place unique qu’il ou elle n’aurait pas eue dans la tour de Babel.
«Il y avait un jour un roi qui avait planté près de son château toutes sortes d’arbres, de plantes et son jardin était d’une grande beauté. Chaque jour, il s’y promenait : c’était pour lui une joie et une détente.
Un jour, il dût partir en voyage. À son retour, il s’empressa d’aller marcher dans le jardin. Il fût surpris en constatant que les plantes et les arbres étaient en train de se dessécher.
Il s’adressa au pin, autrefois majestueux et plein de vie, et lui demanda ce qui s’était passé. Le pin lui répondit : « J’ai regardé le pommier et je me suis dit que jamais je ne produirai les bons fruits qu’il porte. Je me suis découragé et j’ai commencé à sécher. »
Le roi alla trouver le pommier : lui aussi se desséchait… Il l’interrogeait il dit : « En regardant la rose et en sentant son parfum, je me suis dit que jamais je ne serais aussi beau et agréable et je me suis mis à sécher. »
Comme la rose elle-même était en train de dépérir, il alla lui parler et elle lui dit: « Comme c’est dommage que je n’ai pas l’âge de l’érable qui est là-bas et que mes feuilles ne se colorent pas à l’automne. Dans ces conditions, à quoi bon vivre et faire des fleurs ? Je me suis donc mise à dessécher. »
Poursuivant son exploration, le roi aperçut une magnifique petite fleur. Elle était toute épanouie. Il lui demanda comment il se faisait qu’elle soit si vivante. Elle lui répondit: « J’ai failli me dessécher, car au début je me désolais. Jamais je n’aurais la majesté du pin, qui garde sa verdure toute l’année ; ni le raffinement et le parfum de la rose. Et j’ai commencé à mourir mais j’ai réfléchi et je me suis dit: « Si le roi, qui est riche, puissant et sage, et qui a organisé ce jardin, avait voulu quelque chose d’autre à ma place, il l’aurait planté. Si donc, il m’a plantée, c’est qu’il me voulait, moi, telle que je suis. » Et à partir de ce moment, j’ai décidé d’être la plus belle possible!»
Babel est une chance pour la diversité! Mais qu’en est-il de notre besoin d’être compris et d’être ensemble? A-t-il été ruiné à Babel, pour une existence d’errance dans la solitude, avec certes une place pour qui je suis dans ce qui me fait unique, mais seul?
Si nous avons choisi de lire ce texte avec vous, c’est parce que nous nous trouvons entre l’Ascension et Pentecôte. Un temps d’incertitude pour les disciples qui ont vu leur Seigneur les quitter, et qui attendent encore la venue de l’Esprit. Pentecôte, c’est une réponse à Babel. Contre la juxtaposition d’être uniques mais qui ne peuvent plus communiquer, la promesse de Pentecôte, c’est que la belle diversité humaine ne saurait nous condamner à la solitude à défaut d’être tous pareils. A Pentecôte, les langues restent différentes. Mais chacune et chacun comprend dans sa propre langue. Chacune et chacun est accueilli et compris avec tout ce qui fait son histoire de vie, ses goûts, ses choix, ses émotions, ses réactions, ses liens… Compris dans sa langue. C’est tout autre chose qu’une langue unique. C’est la garantie que Dieu nous donnes que toutes et tous avons notre place près de lui, tels que nous sommes. Et c’est une invitation à ce que chacune et chacun de nous, à notre tour, mettons tout en oeuvre pour comprendre la langue de l’autre… et nous faire comprendre dans sa langue!
Amen.

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